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samedi 15 octobre 2011

La cassure de 2001 (2)

Dans le dernier billet, nous avons proposé un résumé d'une étude économétrique novatrice, par des économistes réputés néo-libéraux (NBER...), qui met au jour les effets délétères, pour les Etats-Unis, de l'ouveture au commerce avec les pays à bas coûts. Nous en livrons maintenant une interprétation.

La justification initiale du libre échange (Ricardo, 1817) est qu'il permet à chaque pays (délimité par une frontière douanière) de concentrer ses ressources dans l'industrie où il bénéficie d'un avantage comparatif (relatif, pour être précis). Les gains de productivités dégagés par cette spécialisation, pays par pays, garantissent une richesse optimale pour chacun des participants.

Si riche en enseignement fût-elle pour l'époque, cette théorie n'est qu'un croquis en regard de la complexité réelle de l'économie. Les versions modernes se sont attachées à prendre en compte la lenteur (pour partie irréductible) de la réorganisation des ressources de production en réponse aux chocs occasionnés par l'ouverture à l'échange, notamment avec les pays à bas prix. Si elles autorisent, en principe, des effets distributifs délétères, les études empiriques n'avaient pas, jusqu'à présent, montré qu'ils étaient significatifs (toutes choses égales par ailleurs).

L'étude que nous avons présentée dans le dernier billet remet en cause le statu quo. D'abord elle intègre des données de la dernière décennie, où la pénétration du marché américain par les exportations chinoises  s'est accélérée, le point d'inflection se situant en 2001, l'année de l'entrée de la Chine dans l'OMC. Ensuite, elle utilise un échantillon de données locales (commuting zones), lui conférant une richesse qualitative et statistique qui sont une avancée dans ce domaine de recherche. Enfin, elle comptabilise les répercussions négatives de l'échange au travers des transferts sociaux qu'il provoque.

Un aspect important de ces transferts est qu'ils sont intégrés au même titre que les autres variables, sans jugement de valeur particulier (1). Ainsi, $10 de perdus chez Paul sont exactement compensés par $10 de gagnés chez Jacques, quelles que soient les situations respectives de chacun. En ce sens, sa dimension est purement mercantile, comme la théorie initiale de Ricardo. Or, sa conclusion est que entre les deux tiers et la totalité du gain provenant de l'échange, pour le consommateur,  est anihilé par le dommage qu'il cause aux salariés. Le haut de la fourchette rend caduque la justification du libre échange, avec cette partie du monde, à ce degré (élevé) d'ouverture commerciale.

Il est bien évident que si on intègre une préférence pour une distribution équitable de la richesse au sein de la population du pays (2),  le coût occasionné par l'échange (avec les pays à bas coûts) est  supérieur à l'estimation fournie dans le paragraphe précédant (3). En prenant le haut de la fourchette des coûts, au niveau d'échange pratiqué avec cette partie du monde, le libre échange n'est plus seulement caduque, il pénalise (en net) la société.

Mise à jour le 1er Novembre

Nous avons fait une erreur d'interprétation significative des statistiques de l'articles. La fourchette donnée plus haut n'est pas [2/3, 1] mais [1/3, 2/3]. Merci au commentateur de nous l'avoir signalée.

(1) Il nous faudra relire l'article pour pouvoir apporter une garantie définitive à cette interprétation. A défaut, chacun pourra se reporter aux notes de bas de pages du dernier billet pour y lire l'extrait original sur lequel s'appuie cette interprétation. (2) La grande majorité des individus l’ont. (3) sauf à considérer que les transferts des programmes sociaux aux Etats-Unis compensent totalement le préjudice (moral, financier etc.) que le libre échange fait subir aux catégories socio-profesionnelles les plus touchées.

1 commentaire:

  1. Même remarque que pour le billet précédent: cela me semble très intéressant mais vous écrivez que "entre les deux tiers et la totalité du gain provenant de l'échange" est annihilé, alors que l'article est un peu moins pessimiste (un tiers à deux tiers). Cordialement.

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